Tarte à la pomme [Maria & Astrid]

-Putain de merde.

Oui, je n'avais pas l'habitude d'être vulgaire mais là. J'étais sur le cul. Au sens propre et au sens figuré. Je n'arrivais pas à croire que j'avais battu Miranda. En plus... Mais c'était tellement ridicule. Je l'avais poussé et elle avait marché sur ses lacets. Non c'était vraiment un coup de chance monumentale pour moi. Je n'aurais jamais du gagner face à elle. Jamais.

J'avais été soigné vite fait au niveau de ma joue. La brûlure allait certainement rester un petit moment. Et si je n'avais pas de chance je garderais la cicatrice toute ma vie. J’espérais que non. Avoir une cicatrice sur ma joue droite jusqu'à la fin de mes jours ne m'enchantait pas vraiment. Surtout que ce n'était pas une raison valable d'en avoir une. Imaginez moi dire à mes enfants : ''Oh écoutez, j'ai une cicatrice parce qu'une bourge m'a brûlé la joue avec de l'acide lors d'un jeu de combat organisé par un vil personnage''. Non... Vraiment c'était pas glorieux.
Assise sur mon banc j'étais complètement perdue. Je pensais vraiment à n'importe quoi. J'étais excitée à l'idée de découvrir mon nouvel adversaire mais en même temps j'étais effrayée. Je ne voulais pas me mesurer à quelqu'un d'autre. La chance n'allait pas être tout le temps avec moi. Et si je tombais contre Abigail ? Elle est grade II non ? Ça serait parfait. On combat toutes les deux pour la classe Passion, donc si elle gagne ou si je gagne ça reviendrait au même. Pas besoin de combattre, j'aurais juste à abandonner.

Mon nom résonna dans l'arène. C'était donc déjà à moi ? Je me suis faite soigner et j'ai beaucoup réfléchi, du coup je n'avais pas vu le temps passer. Je me levai et me dirigeai vers l'arène. J'entendis le nom de la personne que j'allais devoir combattre. Leowdeag... Hum... Est-ce que j'avais vraiment envie ? Depuis notre première rencontre j'avais l'impression que je le rencontrais de plus en plus souvent. Et là je dois le combattre. C'était spécial.
J'arrivais dans l'arène presque en même temps que lui. Il souriait. Comme s'il était ravi d'être ici. Il était vraiment spécial le Dorofey. C'était ça qui faisait son charme en quelque sorte.
Avant même d'être près de lui je lançai un peu hésitante mais souriante :

-Encore toi Dorofey ? On... On se voit vraiment souvent dis-donc.

Maria, revenu dans les vestiaires, s'était dépêché de trouver du papier et de quoi écrire, et de noter tout ce qu'il y avait d'intéressant à savoir sur Abigail. Il était aux anges. Une victoire magnifique, et une finale merveilleuse, probablement. Dans tous les cas, il serait content : son adversaire serait soit Miranda, soit sa chère Astrid. Gagnant à tous les coups, il se moquait de perdre ou non le combat au final. La Battle School n'aurait été qu'un prétexte pour se retrouver avec la bibliothécaire et soumettre Abigail. Avec un peu de chance, aujourd'hui, ses deux souhaits seraient réalisés. Mais il avait du mal à croire, car il n'y avait pas à dire, Miranda était bien plus forte, ne serait-ce que par son pouvoir.

Son nom résonna dans l'arène. Il fronça les sourcils. Déjà ? Mais il n'avait encore eu le temps d'explorer toute sa mémoire. En même temps, c'était une activité très chronophage. Il fallait démêler ce qui était sien de ce qui lui appartenait pas, trier le plus important, et tenter de voir les choses de la façon la plus claire possible pour décrire au mieux les personnes qu'il voyait dans les souvenirs de la prof d'Histoire Humaine. Impossible en si peu de temps. Il relut ce qu'il avait pu noter, et, un peu déçu, abandonna son introspection.
Entrant de nouveau dans l'arène, il crut mourir.
Astrid, c'était Astrid !

Plus heureux que jamais, il ne fit rien pour cacher son enthousiasme. Diable, comment s'était-elle retrouvée en finale ? C'était tout à fait curieux. Montée en flèche dans son estime. Une nouvelle fois, elle le surprenait. Il commençait à comprendre ce qu'il lui trouvait.

- Encore toi Dorofey ? On... On se voit vraiment souvent dis-donc.

Elle souriait, mais il sentait de l'hésitation dans sa voix. Visiblement, elle n'avait pas envie d'être là. Bah, si elle avait un tant soit peu compris quel genre de personnage pouvait se vanter d'être le psy, elle saurait qu'il ne lui lèverait pas la main dessus. Il hésitait à utiliser son pouvoir sur elle. Il est sûr qu'ainsi, toute sa vie lui serait dévoilée sans aucun mensonge, sans aucune zone d'ombre, mais ce serait gâcher le plaisir du jeu. Un peu comme un chat devant sa proie, il voulait s'amuser avec avant de tout savoir. Maria se frotta les mains, et hocha la tête, baladant les yeux sur elle avec quelque chose proche de l'avidité.

- On dirait que le hasard fait bien les choses, Astrid.

Le hasard ou avoir appris par coeur son emploi du temps et observé chacune de ses petites habitudes. Elle n'en avait rien remarqué, de toute façon. Il y avait entre eux une distance d'à peu près un mètre qu'il décida de ne pas franchir pour le moment. Il fit mine de s'incliner devant elle et la désigna d'un geste gracile.

- Les dames d'abord !

Il attendait de voir. 

Dorofey semblait réfléchir à quelque chose. Mais ce ne fut pas très long. Il avança vers moi en se frottant les mains et hochant la tête. Il m'observait, enfin je le pensais. Comme d'habitude il arborait son masque qui m'empêchait de voir son visage. C'était bien dommage d'ailleurs...

-On dirait que le hasard fait bien les choses, Astrid.

Mmh... Le hasard c'est lié à la chance non ? Vu que la chance était de mon côté... Peut-être que le hasard aussi. Donc peut-être que le hasard me poussait à rencontrer Dorofey pour une bonne raison ? J'allais y réfléchir. Mais pas maintenant.
Il s'était arrêté à un mètre de moi. On avait jamais été aussi loin et pourtant aussi proche. Enfin... Je me comprenais. À ce moment j'avais envie d'être très loin de lui, plutôt que seulement à un mètre. Je ne voulais pas le combattre. Et certainement que lui non plus. En vrai je ne voulais combattre personne. Les combats ce n'était pas mon truc.
Je fus surprise de voir Dorofey s'incliner devant moi, comme pour faire une révérence.

-Les dames d'abord !

Comment ça les dames d'abord ? Mais de quoi parlait-il ? Du combat... Suis-je bête... Mais... Donc il comptait combattre... Flûte. Hum...

-Très bien...

Je n'étais pas confiante du tout là. Est-ce que j'allais mettre mon plan en œuvre du coup... Bah... Oui. Hors de question que je combatte une deuxième fois. La première fois avait déjà été un fiasco qui avait détruit ma robe et ma joue.
Heureusement que j'avais été au club théâtre du Lycée. Je regardais donc Dorofey droit dans le masque et commençait à laisser couler une larme.

-Do... Dorofey ? On est obligé de combattre ?

Je n'allais pas mentir. Parce que mentir face à un psy comme lui n'était pas une bonne idée. J'allais tout simplement dire la vérité. Y suffisait juste que j'ose...

D'accord. Astrid pleurait. Il haussa les sourcils, parce que ce n'était pas ce à quoi il s'attendait. D'habitude, les participants à la Battle School étaient des espèces de fous furieux prêts à tout pour gagner. Et elle, elle ne voulait pas se battre. D'un côté, cela l'arrangeait, car il n'en mourait pas spécialement d'envie non plus et qu'il ne comptait, aujourd'hui, lever la main sur personne. Une petite question, un peu honteuse, le titillait : elle ne voulait pas se battre ou se battre contre lui ? Il la chassa. Nul besoin de se torturer l'esprit. Il repoussa une mèche échappée de son chignon derrière son oreille.

- Eh bien, dans les formes, oui. Mais j'ai gagné le dernier combat sans lever le petit doigt.

Il sourit, le souvenir tout frais dans sa tête. Il croisa les mains derrière son dos et lui adressa un sourire tout à fait énigmatique, la regardant toujours de haut en bas. En posant de nouveau les yeux sur la joue brûlée de la bibliothécaire, il sentit une espèce d'amertume monter en lui. Miranda aurait pu éviter d'abîmer l'objet de sa convoitise - tout aussi conscient fut-il que sa cousine n'en savait rien.

- Il va falloir un gagnant et un perdant. Moi j'ai fait ce que je voulais faire ici, et franchement, mon rôle de suppléant ne me tient pas plus à coeur que ça.

C'était un gentil euphémisme. Il se moquait bien de la place des Origines dans le classement de Xényla, mais il savait que le dire clairement ne l'avantagerait pas devant Astrid. Il espérait qu'elle comprenait ce qu'il sous-entendait. Désignant la place du Principal, haut dans les gradins, d'un geste gracile, il poursuivit, la voix traînante :

- Donc nous pourrions nous arranger sans problème. Seulement, un combat sans combat, ça ne va pas lui plaire. Tu pourrais prendre ce risque, Astrid ?

Il joignit cette fois-ci les mains devant lui, l'observant, un brin mielleux. Son ton ressemblait à celui qu'il aurait adopté pour s'adresser à une enfant. Il la faisait parler, c'était tout, histoire que le plaisir dure un peu. Il n'avait de toute façon pas dans l'idée de gagner, surtout si "se sacrifier" lui permettait d'entrer dans les bonnes grâces de la jeune femme.

Comment est-ce que Dorofey allait-il réagir ? Je ne savais pas trop... Mais je le voyais étonné. Ou alors il réfléchissait. Ou peut-être même les deux... Mais je ne voulais pas combattre. Hors de question.
Il passa une lèche de ses cheveux derrière son oreille. Cela me fit remarqué que ses cheveux étaient attachés, ce qui libérait son visage. Enfin il y avait toujours le masque, mais son visage était plus visible, plus... lisible.

-Et bien, dans les formes, oui. Mais j'ai gagné le dernier combat sans le ver le petit doigt.

Son combat précédant était contre Abi. J'avais remarqué dans les vestiaires qu'elle n'était pas dans un état normal, mais je n'avais pas osé lui parler. Donc il s'était passé quelque chose... Mais je n'avais pas le temps d'y penser.
Est-ce qu'il m'avait fourni une réponse ? Je ne savais pas vraiment. Il a dit que selon les règles on devait se battre mais en même temps juste après il a dit ''Mais''. J'étais perdu.
Je voyais Dorofey sourire. Il avait les bras dans le dos et m'observait toujours depuis avant. J'essuyais le début de larmes sur mes joues, en évitant de toucher ma brûlure.

-Il va falloir un gagnant et un perdant. Moi j'ai fait ce que je voulais faire ici, et franchement, mon rôle de suppléant ne me tient pas plus à cœur que ça.

Un gagnant et un perdant... Oui... Mais c'est derniers mots tournaient dans ma tête. Il ne portait pas vraiment d’intérêt pour son rôle de suppléant ? Mais... Alors pourquoi il était suppléant de la classe Origine dans ce cas ? Personnellement, si je faisais la Battle School c'était seulement pour les Passions, sinon je n'aurais jamais foulé le sable de cette arène... Je voulais gagner des points pour les Passions. J'avais l'impression que ces petits comptaient sur moi. Abigail n'était plus là pour gagner la première place donc il me la fallait !
J'étais déterminée, mais je n'affichais rien sur mon visage. Mon plan était toujours d'actualité. Et encore plus qu'avant.

Dorofey fit un geste presque délicat vers les gradins. Mais plus précisément vers le Principal. En tournant mon regard vers lui, je pus sentir comme une vague d'impatience qui volait dans l'air jusqu'à nous.

-Donc nous pourrions nous arranger sans problème. Seulement, un combat sans combat, ça ne va pas lui plaire. Tu pourrais prendre ce risque, Astrid ?

Est-ce que je pourrais prendre le risque de déplaire au Principal... Très franchement... J'avais bien retenu ses mots à la fin du combat avec Miranda : ''J'espère pour toi qu'il sera plus intéressant.''. Je l'avais déjà déçu et maintenant il attendait de moi que je me batte vraiment, qu'il y ait du sang. Mais c'était hors de question. Je n'étais pas sa marionnette...
J'avais perdu mon regard dans les gradins. Je regardais le Principal. Je n'allais pas combattre, mais j'allais gagner. Dorofey était prêt à s'arranger, tant mieux. C'était quelqu'un de bien au final...

Je remis toute mon attention sur Dorofey. La mèche de cheveux qu'il avait coincée derrière son oreille volait désormais grâce à une légère brise. Je lui dis :

-Je suis.. Je suis tout à fait prête à prendre ce risque Dorofey.

Oui. J'étais confiante... Mais en même temps... Il avait raison de dire que c'était risqué. Le Principal n'allait pas laisser passer ça... Il allait me saquer, peut-être même me renvoyer. Peu importait. Tant que les points allaient aux Passions.
J'avançais vers Dorofey, attrapant sa main droite dans mes deux mains.

-Tu dis que l'on peut s'arranger... J'aimerais le croire... Je ne veux pas combattre mais les Passions ont besoin de ses points... Tu comprends ?

Je le regardais droit dans les yeux. Car oui, j'étais assez proche de lui pour voir ses yeux à travers son masque. Je ne les voyais pas clairement, mais je distinguais leur couleur violette. J'étais sincère, aucun mot sortant de ma bouche n'était mensonger. Et puis... J'avais l'impression que si je sortais les bons arguments, il me céderait la victoire d'une quelque manière.

-Sans les Passions je serais rien aujourd'hui... J'étais dans cette classe avant et maintenant... Je dois me battre pour elle. Je ne me sentirais pas légitime de rester suppléante si je perdais... Pas maintenant. Tant pis si le Principal décide de me renvoyer parce que je n'ai pas respecté les règles.

Maintenant je devais le convaincre. Il parlait d'un arrangement. Il fallait bien qu'il soit gagnant lui aussi dans cette histoire... Lui aussi courait les mêmes risques que moi. Sans détourner le regard, même si son masque me perturbait, je continuai :

-Dorofey... Si tu acceptes de me laisser gagner. Je t'accorderai une faveur... Ce que tu veux.

Je tentais. Même si j'avais l'impression qu'il se moquait de perdre ou de gagner, j'avais peur qu'il refuse. J'avais peur qu'il choisisse de gagner... De combattre...

Spoiler:

- Je suis.. Je suis tout à fait prête à prendre ce risque Dorofey. Tu dis que l'on peut s'arranger... J'aimerais le croire... Je ne veux pas combattre mais les Passions ont besoin de ses points... Tu comprends ?

Bien sûr qu'il comprenait, ce n'était pas pour rien qu'il lui avait fait cette proposition. Elle s'était approchée et avait pris sa main dans la sienne, geste qu'il observa avec un brin de curiosité et dont il s'amusa. Ils devaient bien se demander ce qu'ils étaient en train de fabriquer, dans les gradins. Mais il semblait que la bibliothécaire n'avait pas fini de parler :

- Sans les Passions je serais rien aujourd'hui... J'étais dans cette classe avant et maintenant... Je dois me battre pour elle. Je ne me sentirais pas légitime de rester suppléante si je perdais... Pas maintenant. Tant pis si le Principal décide de me renvoyer parce que je n'ai pas respecté les règles.

Maria faillit la trouver ennuyante. Mais elle décidait d'outrepasser les règles, et ça, c'était une attitude qui lui plaisait, si dégoulinante de niaiserie en fut la raison. C'aurait pu être plutôt noble d'esprit, elle était prête à se battre pour son clan, son groupe. Mais c'était commun. Par ailleurs, il espérait que le Principal n'irait pas jusque-là - son renvoi aurait été compromettant. Mais il était sûr que non. S'il avait gardé le médecin et le gardien après le carnage qu'ils avaient causé pas si longtemps auparavant, il passerait là-dessus. Quoique, dès qu'on parlait de carnage, le directeur de l'établissement semblait enclin à la clémence.
Astrid avait les yeux rivés dans les siens, pas près de ciller. Lui non plus, d'ailleurs. Elle semblait déterminée. Un peu comme la fois où elle avait tenu à le faire danser sur une fontaine. En tous cas, il était tout à fait content : elle parlait. C'était tout ce qu'il voulait.

- Dorofey... Si tu acceptes de me laisser gagner. Je t'accorderai une faveur... Ce que tu veux.

Il cligna des yeux, une vague de joie triomphante montant en lui. Ce qu'il voulait ? Astrid ne savait pas dans quoi elle s'était embarquée. Naïve, il retint. Il savait qu'elle ne le détestait pas, mais de là à lui faire confiance... c'était une bien drôle de sensation. Il allait en profiter un peu, juste ce qu'il fallait. Si avant la laisser gagner ne le dérangeait pas, cette fois-ci, cela l'enchantait.
Son intense satisfaction dut se lire sur son visage, car il n'avait pas cherché à la cacher.

- Voilà un arrangement qui me plait. Très bien ! Astrid Kumarlik vous êtes conviée chez le psychiatre dans la semaine !

Il eut un sourire malicieux, se baissa vers elle et ajouta à voix plus basse :

- Et obligée de venir, bien entendu.

Le contact de leurs mains se rompit, le psychiatre se redressa.

- Je te ferai parvenir les détails plus tard, ne prévois rien.

Il jeta un regard circulaire sur l'arène, poussa un soupir ironique, réfléchissant à comment finir cet "affrontement" en beauté. Bien vite, il trouva quelque chose qui ferait un tant soit peu l'affaire, même si ce serait un peu salissant. Maria s'assit en tailleur dans la poussière par endroits tâchée du sang des anciens combats, écarta le bras, bien droit.

- Nous y voilà donc, Astrid. Souffle et je tombe, c'est tout ce que tu as à faire pour gagner.

Théâtral à souhait. Maria était plus heureux que jamais, la réalité ayant dépassé ses espérances : Abigail humiliée, Astrid rencontrée et invitée, deux sorties remarquées. Comblé, il attendit.

Dorofey ne sembla pas croire ce que je venais de dire. Il cligna des yeux quelques instants avant que son visage ne soit illuminé par quelque chose. Cela se situait entre la surprise et un certain bonheur.
Vraiment, c'était comme une satisfaction. Ce que j'avais proposé le rendait heureux.

-Voilà un arrangement qui me plaît. Très bien ! Astrid Kumarlik vous êtes conviée chez le psychiatre dans la semaine.

Chez lui ? Dans son bureau certainement.
Dorofey sourit narquoisement en se baissant vers moi. Et d'une voix plus faible me dit :

-Et obligée de venir, bien entendu.

Bien entendu M. Leowdaeg. Un arrangement est un arrangement. Si je gagnais ce combat, je viendrais. Sinon... Non...
Il libéra sa main des miennes et se redressa pour reprendre sa taille normale. Je pris un peu de temps pour l'observer. J'adorais ses cheveux. Rien à dire de négatif sur ce point là. Leur couleur, leur longueur... Depuis la première fois où on s'était parlé, et que j'étais un peu éméchée, j'avais envie de poser ma main sur sa tête. Oui...

-Je te ferai parvenir les détails plus tard, ne prévois pas.

Très bien. Je lui souris. Il sembla vraiment déterminé et prêt à tout organisé. C'était comme si il attendait ce moment depuis des jours et qu'il avait déjà tout prévu.
Je suivais des yeux son visage. Il tournait la tête circulairement pour observer l'arène. Il soupira. Était-il en train de repenser à cette décision ? Où cherchait-il un moyen de perdre pas trop ridicule ? En le voyant réfléchir je me sentais presque coupable de lui avoir fait cette demande... Lui aussi allait descendre dans l'estime du Principal. Moi je le savais que je n'étais pas bien haut, mais peut-être que Dorofey était en bonne position... Mais en même temps... Pouvait-on être heureux d'être dans les bons papiers du Principal ? Je n'étais pas certaine...

Dorofey sembla trouver quelque chose et s'assit en tailleur sur le sable.

-Nous y voilà donc, Astrid. Souffle et je tombe, c'est tout ce que tu as à faire pour gagner ?

Vraiment ? Il voulait que je lui souffle dessus et il tomberait ? Plus de mise en scène n'était pas possible... C'était tout à fait l'homme qui m'avait accompagné boire quelques verres. Toujours dans l'extravagance et pourtant toujours aussi mystérieux.


-D'ac... D'accord.

J'avais tout à fait compris. Je lui soufflais dessus et il tombait. Mais j'étais hésitante... Si jamais il se moquait de moi ? Si jamais il ne se laissait pas tomber ? Si... Trop de ''si'' Astrid.
Je devais avoir confiance en sa parole. Je m'accroupis donc en face de lui et lui souris. On pouvait aller encore plus loin dans la mise en scène. Je le savais. J'approchai ma main de ma bouche et fis un baiser sur ma paume. Une fois ceci fait, je soufflai sur ma main, pour lui envoyer mon baiser. Cette idée sortait droit d'un roman... Une femme qui faisait tomber les hommes avec ses baisers. Pourquoi pas moi aujourd'hui ?
Comme promis, quelques secondes après que j'ai soufflé, Dorofey se laissa tomber en arrière. Un sourire de joie apparu sur mon visage. J'étais contente.
Contente d'avoir gagner, mais bizarrement j'étais aussi contente d'avoir droit de rendre visite à ce cher Dorofey chez lui. Peut-être allais-je enfin pouvoir répondre à toutes les questions que je posais sur lui. Le mystère Dorofey allait-il enfin être résolu par mon esprit ? J'étais peut-être gagnante dans les deux parties de notre arrangement au final.

Dans ce dernier face à face de cette session de la Battle School, tout avait, pour Maria, été parfait. Astrid s'étant prêtée au jeu - et même en ayant rajouté un peu, ce qui ne lui faisait pas peu plaisir - il avait donc sereinement laissé ses épaules toucher le sol et la voix dans le haut-parleur annoncer la bibliothécaire gagnante. Il n'aurait manqué qu'une musique en fond pour accompagner la scène. Il verrait ça la prochaine fois, s'il avait encore à faire dans cette arène.  Maria se releva tranquillement et se hâta de chasser du mieux qu'il le pouvait la saleté accumulée sur ses vêtements. Le blanc, ce n'était pas une très bonne idée, il voulait bien le concéder.

Il adressa une révérence tout à fait exagérée à l'assistance, se détacha les cheveux et, sautillant presque dans l'arène, dépassa Astrid pour rejoindre les vestiaires. En passant devant elle, il lui adressa un geste de la main et se retourna.

- Surveille les retours de livres, il pourrait y avoir une missive à l'intérieur !

Un sourire énigmatique plus tard, il se détourna et poursuivit sa route vers la sortie. Ce jour était à marquer d'une pierre blanche : ils étaient rares, ceux où il n'y avait rien à jeter.

Parfois les cerveaux les plus intelligents sont les plus problématiques. Ce psychiatre était vraiment quelqu'un de tordu. Ingénieux, mais seulement pour lui. De ce qu'il voyait, Dorofey était particulièrement égoïste. Cela apporta un léger doute dans le cœur du Principal. Était-il vraiment le parfait successeur ? Pouvait-il lui faire confiance si il lui léguait son lycée ? Pour le moment, il n'en était pas certain. Mais ce n'était pas plus mal vu qu'il ne comptait pas jeter son poste comme ça. Dans tous les cas, cette petite Astrid lui accordait bien du souci. Il verrait en temps voulu ce qui. En ferait. Sans un mot, il applaudit avant de se rassoir. Elle venait d'être nommée première de sa session. Il ne pouvait que la féliciter pour le moment.

- Félicitations jeune Astrid ! Vous êtes première de votre session, quelle joie !

Et quelle chance surtout. Car elle n'avait gagner que par chance, l'homme en était bien conscient.